Parlons un peu d'Horreur
Lorsque l’on parle d’horreur, la pensée va naturellement vers le cinéma, où le genre fleurit depuis de nombreuses années. Du classique Hitchcock aux récentes réussites de Jordan Peele, en passant par les très populaires Saw, on ne cesse de se presser dans les salles à la recherche de l’adrénaline et de l’angoisse que proposent ces films. De fait, l’horreur aux yeux du grand public a aujourd’hui une image bien connue, presque familière : la caméra se posant une seconde de trop sur le coin sombre derrière l’épaule du personnage principal révèle des yeux qui ne devraient pas être là. Un silence précède les fameux jump scares.
Et quand vous pensez que tout est fini… Ne lâchez surtout pas votre arme de fortune ; tout ne vient certainement que de commencer.
Sina Pakzad Kasra - Vertigo, 2018
Mais l’horreur n’est évidemment pas confinée au grand écran (ni même au petit, bien que de nombreuses séries, telles que The Haunting of Hill House et Stranger Things, aient été des succès retentissants récemment). Tout ce qui nous fait peur prospère depuis toujours, sous une forme ou une autre. Une longue tradition orale nous suit depuis des millénaires, tentant de nous avertir sur les dangers qui se cachent dans le noir (et, parfois, en plein jour…). Monstres allégoriques de la mythologie, sorcières et autres cruelles créatures piégeant les innocents dans les contes, spectres apparaissant quelques secondes avant une catastrophe… Les histoires qui font peur sont aujourd’hui encore de fidèles compagnes des longues nuits autour d’un feu rassurant (... ou des longues nuits devant son ordinateur, au choix, à se perdre dans les myriades de threads d’horreur qui peuplent Internet, héritiers modernes et écrits de ces mêmes histoires d’épouvante).
Nightwish - IMAGINAERUM, 2012
Alors qu’en est-il de la littérature ? Il est communément admis que la littérature de l’horreur commence avec les descriptions des Enfers de Dante Alighieri, dans la Divine Comédie, et celles de Lucifer, qui marquent encore les esprits et les imaginaires à ce jour, du Paradis Perdu de John Milton. C’est néanmoins dans les romans gothiques du XIXème siècle, où l’horreur est intimement liée au fantastique, que le genre s’épanouit avec des noms inoubliables tels que Mary Shelley ou Edgar Allan Poe, bien qu’en maître de l’horreur Lovecraft est toujours une référence incontestée, son influence résonnant encore aujourd’hui dans des myriades de livres et jeux d’horreur. Il est également difficile de ne pas mentionner le Dracula de Bram Stoker, qui a façonné l’image du vampire moderne.
La littérature de l’horreur moderne est discrète. L’évitent facilement ceux qui ne veulent pas la voir, et le seul ayant réussi à se graver une place de marque pour le grand public est, bien sûr, Stephen King. On peut également citer la célèbre collection Chair de Poule, dont les romans font frissonner de nombreux enfants.
Si, chez les Titanides, nous avons une douce préférence pour l’horreur gothique, ce que nous voulons réellement voir entre les lignes d’un roman d’épouvante c’est la construction de la peur et l’angoisse. Chaque époque a été effrayée, chaque génération a eu ses monstres, réels ou imaginés, et chaque auteur a pu, à travers le surnaturel, l’incompréhensible, le trop vaste et le trop affreux, explorer à sa guise ces peurs sociétales dans lesquelles il ou elle baignait. De quoi avons-nous peur ? Pourquoi avons-nous peur ? Comment réagirons-nous quand de Charybde nous tomberons en Scylla et réaliserons que nous allons inévitablement être dévorés par une chose si horrifique que nous n'avons aucune chance de la vaincre ?
Sanglante ou immatérielle, tragique ou remplie d’un drôle d’espoir né de l’entêtement humain de ne jamais abandonner, l’horreur est à la fois une ôde et une mise en garde envers le monstrueux, l’étrange, mais aussi une éternelle question quant à notre place et notre réel pouvoir dans ce monde que nous pensons être le nôtre.
Sean Donaldson - Cthulhu Says Hi, 2013
Les recommandations des Titanides :
Carmilla - Sheridan Le Fanu
Le coeur révélateur - Edgar Allan Poe
Le papier peint jaune - Charlotte Perkins Stelson
Le tour d’écrou - Henry James
Nous avons toujours vécu au château, Shirley Jackson
Mexican Gothic - Silvia Moreno-Garcia
Le Sabbat des Éphémères - Ariane Gélinas
Serpentine - Mélanie Fazi
Bibliographie :
https://www.cairn.info/revue-sociologie-de-l-art-2003-1-page-37.htm
http://iutmdl.over-blog.com/2018/12/l-evolution-de-la-litterature-d-horreur.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/Horreur_(litt%C3%A9rature)
The Haunting of Hill House, Mike Flanagan
Stranger Things, Matt et Ross Duffer
Divine Comédie, Dante Alighieri
Paradis Perdu, John Milton
Dracula, Bram Stoker
Collection Chair de Poule, R. L. Stine
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